Discours de la servitude volontaire, E. de La Boétie.

Publié le par P.R-S

La servitude n'existe que parce qu'elle est volontaire.

Voila l'idée principale de cet opuscule, écrit par un jeune garçon entre 16 et 18 ans en 1546-1548. La Boétie s'étonne en effet que des milions de gens puissent servir, sans mot dire, un seul homme qui, loin d'être le plus fort des hommes, n'a pas plus de légitimité qu'un autre.En clair, le problème est de savoir ce qui fait que, dans la nature humaine, une monarchie puisse exister et les peuples servir des tyrans.

 

Il n'y voit qu'une explication : "C'est le peuple qui s'asservit, qui se coupe la gorge, qui, ayant le choix, ou d'être serf ou d'être libre, quitte la franchise et prend le joug, qui consent à son mal, ou plutôt le pourchasse".

On retrouve ici un thème cher à l'existentialisme sartrien : la notion de choix. L'homme n'est pas contraint à servir un tyran. Il n'a même pas à combattre, il n'a qu'à refuser de servir, ne pas donner sa liberté, ne pas s'asservir. Tout est donc une question de choix et si la servitude existe c'est qu'elle est volontairement choisie.

 

Mais La Boétie va plus loin encore. Son analyse transperçante lui permet de comprendre que les tyrans sont portés par quelques ambitieux qui se corrompent, aveuglés par le pouvoir et la richesse du Tyran"Ces misérables voient reluire les trésors du tyran et regardent tous ébahis les rayons de sa braveté". Ces quelques ambitieux vont corrompre à leur tour des dizaines d'autres, attirés par le pouvoir, qui eux-même vont corrompre des centaines puis des milliers d'autres. Le tyran est donc porté par un système pyramidaire lui permettant "d'asservir les sujets les uns par le moyen des autres."

 

 

L'humanisme de La Boétie, mettant les hommes face à leur responsabilité, qu'ils soient bourreau ou victime, est riche d'enseignement tout comme sa conviction que seul la loi et la paix peuvent redonner au peuple son pouvoir de décision, non pas en terme démocratique chez La Boétie mais en esquissant une premier théorie du contrat, le prince ne pouvant se maintenir que si le peuple lui accorde son service.

Nulle besoin de violence donc, car il suffit que chacun cesse d'obéir et de donner sa servitude pour que le tyran, privé ainsi de pouvoir, s'effondre sans effusion de sang.

 

Existentialisme, humanisme, réformisme, un ouvrage qui résume à lui seul la pensée humaniste que nous défendons ici.

Publié dans Ouvrages

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article